« Jamais quitter Nîmes »
Felix Trouvé est un jeune autiste attachant de 23 ans. Il adore Nîmes. Il se balade seul de commerçant en commerçant. Il propose des « câlins d’amitié » car c’est l’une des choses qui le rend le plus heureux. Portrait pour le comprendre et mieux le recevoir.
Ma première rencontre avec Félix date d’il y a 4 ans. La scène se passe au Royal Hôtel, place d’Assas, au moment où les employés s’affairent et préparent l’accueil des futurs clients. Félix soliloque puis se poste devant moi et me lance au visage : « Je m’appelle Félix, je suis autiste et j’aimerais te faire un câlin d’amitié ». Amusé, je m’exécute. Tout le personnel, plus habitué, aussi. J’ai l’impression d’avoir rencontré Dustin Hoffman sorti du film « Rain man ». Depuis, Félix fait partie de mon paysage comme celui de nombreux Nîmois. Je ne cesse de le croiser en ville. Il se balance en permanence sur ses deux pieds et tente, avec plus ou moins de réussite, d’entrer en contact avec les Nîmois. |
---|
Le combat de la normalité |
Félix n’est pas comme tout le monde mais cherche à le devenir. Le jeune Nîmois est autiste. « Un autiste à l’envers », aime à expliquer sa maman. Félix est né en Lorraine, à Sarreguemines. Sa différence est détectée à l’âge de 3 ans. Depuis, ses parents sont engagés dans un combat pour aider Félix à vivre le plus normalement du monde. Il s’est installé à Nîmes il y a 8 ans. Il vit dans un superbe appartement non loin de l’avenue Feuchères. Didier et Dominique, ses parents, ne veulent pas que Félix passe ses journées dans un institut spécialisé, encore moins dans un hôpital. Ses parents veulent ce que veut Félix. Pour cela, ils redoublent d’écoute et de compréhension envers ce jeune homme toujours impatient de dire ou de faire quelque chose. Côté scolarité, Félix a étudié de ses 14 à ses 17 ans. « Il a appris à faire ses lacets en deux semaines. Dans les écoles pour autiste, ils n’acceptent que des chaussures à scratchs ». C’est d’ailleurs dans cette école qu’il fait la connaissance de ses amis les plus proches : Morgan Chabanel et Yamina, la fille de Karima. |
Karima, photographe nîmoise, se confie sur cette relation unique : « Félix s’est ouvert à moi sur ses difficultés à entrer en communication avec les autres et depuis j’essaie de l’aider ». Certes, elle reconnait qu’il faut parfois « le recadrer » car il développe un amour envahissant. « Mais je lui accorde des moments rien qu’à lui, comme lorsque je l’ai invité au festival de courts métrages à l’Atria, Regards croisés ». Il faut imaginer ces moments où les gens lui portent une attention toute particulière et en fonction de ses propres centres d’intérêts. |
Quatre bonheurs simples |
« Je suis Félix, je suis heureux car j’aime beaucoup avoir des amis », me dit-il, débordé par son besoin affectif incontrôlé. Alors Félix se balade de manière autonome. « Les commerçants l’ont adopté », confie Dominique. Ainsi Nathalie Godde, de la boutique Eugénie, s’est liée d’affection pour ce jeune homme qui touche les cheveux de sa fille, Coline, avec délectation. La vie de Félix tourne autour de quatre bonheurs simples : faire des câlins (Free huggs), le bruit des moteurs (cars, trains…), toucher la matière des survêtements de style K-way et les baskets de couleurs rouge, jaune et orange. La journée, il participe aux activités du foyer Hubert Pascal. « Je vais sur Internet pour regarder des vidéos comme le TER Micheline X2220 ». Les parents de Félix s’inquiètent pour lui car il ne travaille pas malgré son goût prononcé pour la cuisine. « Je fais des gâteaux roulés très bons », me confie-t-il. |
Les filles de la Jonquera |
Félix a été adopté par les Nîmois : Freddy Cerda et les filles de l’hôtel Atria, Patricia la coiffeuse de la rue Notre Dame, Véronique l’esthéticienne, Dominique Ponzo, Nicolas Prade… Le jeune Nîmois fait des câlins pour « canaliser son trop plein d’affection ». Félix n’a pas eu encore la chance d’embrasser une fille sur la bouche. Même celles rencontrées au Dallas à la frontière Franco-Espagnole. « J’ai essayé de lui expliquer que c’étaient des professionnelles et que nous avons payé pour une prestation », explique son papa, Didier. Médecin conseil à la sécurité sociale, son papa est celui qui le contrarie de temps à autre et essaie de rendre son fils heureux. Félix nous interrompt dans cette conversation par un « les filles de la Jonquera me regarderont ». Lui, l’homme désireux d’y retourner et de goûter à cette expérience de la vie. L’interview se poursuit sur son attachement singulier à la ville : « J’aimerai rester toute ma vie à Nîmes, j’aime bien, c’est beau et j’ai différents amis ». L’avenir sans ses parents pourrait passer par les nouvelles résidences dont le projet est porté par le foyer Hubert Pascal. Un pas de plus vers une plus grande autonomie de Félix, un homme adulte très attachant. |
Un lieu : |
la terrasse du Danieli, place d’Assas, car j’offre des fleurs et des chocolats aux serveuses de l’été. Je suis un autiste intelligent et pas violent. |
Un événement : |
la féria car je vois encore plus de monde et j’arrive à entrer seul à l’Impérator |
Un personnage : |
Karima car elle me fait des surprises et s’occupe de moi de temps en temps. |
Suivez-nous sur les réseaux sociaux